The beginning ends

Winter rides the wings of Heaven
Sorrow marches through the land
This is the beginning of the end

Rage, Beginning of the End

 

L’attente générée par de mystérieux clips vidéo depuis deux mois a pris fin ce soir. Il est revenu. Mais qui ?

 

 

Je le sais, mais je ne vous le dirai pas.

 

 

Nalyse de Raw du 2 janvier à ne pas lire si on ne l'a pas encore vu et qu'on veut garder la surprise

 

Winter rides the wings of Heaven
Sorrow marches through the land
This is the beginning of the end

Rage, Beginning of the End

 

L’attente générée par de mystérieux clips vidéo depuis deux mois a pris fin ce soir. Il est revenu. Mais qui ?

 

 

Je le sais, mais je ne vous le dirai pas.

 

 

Nalyse de Raw du 2 janvier à ne pas lire si on ne l'a pas encore vu et qu'on veut garder la surprise

 

 

Évidemment, le gros événement de ce Raw fut le retour du mystérieux catcheur dont on nous parlait depuis des mois (je vous rassure, il ne s'agit pas de Brodus Clay, encore absent cette semaine), mais il serait injuste de réduire ce très bon épisode de Raw à cet événement, que vous me permettrez de traiter en dernier.

 

Car voyez-vous, ce qui est important en ce moment, c'est que nous sommes en période pré-Royal Rumble et que l’époque est propice au développement des feuds destinées à culminer au prochain Wrestlemania. Les storylines ont donc bien avancé ce soir, et les machs ont pour la plupart été d’un fort bon niveau. Même le match féminin n’a pas été trop déplaisant, c’est dire.

 

 

Enfin c'est une question de point de vue.

 

 

Le Rumble est effectivement dans pas mal de têtes en ce moment, notamment dans celle de Wade Barrett, qui annonça sa ferme certitude d’en être le vainqueur cette année et sa satisfaction d'être débarrassé pour un bon moment de son rival Randy Orton. Son adversaire du soir, le toujours cocasse Santino Marella, l’interrompit cependant bien vite pour lui rappeler qu’il avait tenu plus longtemps que lui l’année dernière. Même si c’est vrai, cela n’est pas le genre de chose à dire à Wade Barrett: cet homme-là a le sang chaud, et le squash subi par Santino en est la preuve. La feud avec Orton ayant été interrompue précipitamment par la blessure de la Vipère, il fallait bien laisser un peu de présence à l'Anglais, et ce court match n'a pas la prétention de faire davantage que du remplissage. Laissons aux bookers le temps de se retourner, et parions que la semaine prochaine, Barrett aura un rôle plus intéressant à jouer.

 

Restons dans le domaine du remplissage et évoquons le match féminin par équipe opposant les Bella Twins à Kelly Kelly et Eve Torres. Un peu plus long que d’habitude (en tout cas cette fois probablement assez pour aller pisser), toujours un peu laborieux, le combat fut cependant sauvé par un joli moonsault d’Eve et par un échange de fessées parfaitement ridicule, mais néanmoins agréable à l’œil entre Kelly Kelly et l’une des jumelles. On ne peut toutefois que regretter la fin lamentable du match, encore une fois fondée sur une tricherie à l’échange de jumelle pendant que l’arbitre ne regardait pas. Si l'on tient absolument à ne pas leur accorder une seule victoire clean, ne pourrait-on pas faire tricher les jumelles d'une autre façon ?


Un peu plus intéressante, la storyline entre R-Truth et le Miz suit son petit bonhomme de chemin. Quelques segments backstage nous ont montré le Miz animé d’un esprit de vengeance à la recherche de son ancien comparse, avant que l’ancien champion à la coiffure de lycéen n’affronte Sheamus. Le match a commencé par une très impressionnante série de coups de la part de Sheamus sur la poitrine de son malheureux adversaire. On en a eu mal pour lui. Découragé, le Miz quitta le ring pour essayer de s’enfuir au milieu de la foule. Il fut rapidement arrêté par R-Truth, dut faire demi-tour et fut cueilli par un brogue kick de Sheamus dans sa sale face. Son ancien partenaire en profita pour lui porter son coup favori : le jeté d’eau au visage. C’est imparable.
 

 

À l’eau ?

 

 

Notons que R-Truth apparaît tout aussi cinglé qu’avant, mais désormais chaleureux et sympathique avec le public. Il a bel et bien basculé du côté des faces et se dirige vers une rivalité ouverte avec le Miz. Je suis plutôt content de voir le Miz s’éloigner un peu des feuds de main-event, n’ayant jamais été très amateur du personnage, mais cette feud de midcard qui s'annonce pourrait être plaisante.

 

Car le haut de la carte est occupé par des champions en titre aux capacités bien supérieures. Nous avons par exemple eu droit à un très bon match champion vs champion entre Daniel Bryan et Cody Rhodes. Bien qu’il soit dommage que le match ait eu lieu très tôt dans la soirée, ce qui donne l’impression que le titre de Bryan n’est pas aussi important que celui de Punk, il fut très bon. Les deux hommes stravaillent très bien ensemble. L’issue de l'affrontement, une victoire de Bryan sur un roll-up peut paraître un peu brusque, mais à mon sens elle contribue plutôt à construire le personnage de Bryan : un catcheur technique dangereux car capable de placer à tout moment un mouvement décisif apte à lui apporter la victoire.


Je remarque d'ailleurs que Daniel Bryan en fait toujours trop. Il remporta bien entendu le match et célébra sa victoire avec un enthousiasme vraiment exagéré, on avait presque l’impression de le voir célébrer une victoire dans le main-event de Wrestlemania plutôt que contre un champion secondaire dans un show hebdomadaire. Faut-il y voir un indice de l’évolution de son personnage ? Un champion un peu prétentieux qui fêterait chaque victoire avec une telle exubérance risquerait de finir par devenir agaçant, et Danny pourrait ainsi devenir heel petit à petit. Je ne suis cependant pas certain que Bryan ferait un bon méchant : sa popularité vient plus de ses extraordinaires talents de catcheur que de son charisme naturel, et j’ai toujours pensé que le charisme était plus nécessaire aux heels qu’aux faces. En tout cas, si ce match est le premier d'une série, je suis preneur.


Le titre de CM Punk, lui, bénéficie d'un travail plus soigné de la part des bookers et est au cœur d’une vraie storyline. Après un bref rappel des événements de la semaine passée qui avaient vu Dolph Ziggler obtenir un match de championnat, ledit match commença. Évidemment, il était clair que CM Punk allait conserver son titre : on le voit mal le perdre dans un banal Raw, surtout aussi écrasé par un autre événément (le retour de qui vous savez, mais nous en parlerons plus tard). Par contre, le méchant Laurinaitis ne cessant de comploter contre Punk, on imaginait qu’il allait nous faire un coup fourré, le salaud. Et ce qui devait arriver arriva : Punk ayant arraché par inadvertance la protection d’un coin du ring, le GM par intérim saisit l’occasion de l’emmerder qui lui était offerte et vint distraire l’arbitre pour lui signaler cette intolérable dégradation du matériel. L’officiel ne put alors constater que Ziggler était en train de signifier son abandon, pris qu’il était dans un anaconda vice. Ziggler put ensuite reprendre le dessus et gagner le match par décompte à l’extérieur. Punk conserve donc son titre.


Saluons au passage la WWE pour accorder un push bien mérité au talentueux Ziggler. Ce match encore une fois de haute tenue et la bonne alchimie entre lui et CM Punk nous montrent que Dolph est désormais mûr pour obtenir un titre de champion majeur (mais par pitié pas trop tôt, le règne de Punk est un vrai bonheur qu'il faudra prolonger au maximum).

 

 


Dolph Ziggler porte un slip sur lequel il est écrit « heel ». Si un face faisait la même chose, devrait-il aussi porter un masque avec l’inscription « ass » ?

 

 

Punk ne manqua bien évidemment pas de signifier son mécontentement à son supérieur hiérarchique. Ce dernier répliqua qu’il n’était pour rien dans sa défaite, et que Ziggler l’ayant vaincu deux fois, il lui accordait un match pour le titre au Royal Rumble. Et d’ailleurs, pour éviter les problèmes, il avait choisi un modèle de probité et d'honneur pour arbitrer la confrontation : lui-même. Un match qui s’annonce alléchant, aussi bien au niveau du développement de l’histoire que du spectacle dans le ring.


Je me permets au passage une petite réflexion. Vous êtes-vous demandé pourquoi le personnage incarné par Punk est si populaire à l’heure actuelle ? Je vous livre tout inopinément ma propre théorie tirée par les cheveux. La WWE a longtemps été frappée du sceau de la Kids Era tant décriée. Mais les kids grandissent et deviennent des teenagers. Or, devenu très populaire lors de sa feud contre le symbole de la Kids Era, j'ai nommé John Cena, CM Punk est en opposition systématique à l’autorité (incarnée par Vince McMahon puis John Laurinaitis), aime dire des gros mots, est cool et a les cheveux gras. Mais oui ! CM Punk est tout simplement une métaphore de l’adolescence ! Les amis de la sur-interprétation apprécieront (et comme je n’étais pas encore rédacteur au moment de la Straight-Edge Society, ils ne connaitront malheureusement jamais mon autre théorie encore plus fumeuse sur CM Punk. Tant pis pour eux.).
 

 

– Punk, ça suffit, va dans ta chambre !
– M’en fous t’es même pas mon père !

 

 

Puisque nous parlions de Cena, attardons-nous un peu sur son cas. Ce Raw a commencé par un extrait du show de la semaine dernière, plus précisément du moment où Kane incita le public à scander « Cena sucks ». La WWE a bien compris que son plan n’avait qu’à moitié fonctionné, puisqu’une partie non négligeable des spectateurs répliqua à cette invective par le traditionnel « let’s go Cena ». Il fut donc décidé de ne pas chercher à cacher ce fait, mais au contraire de s’en servir. Le réglage du son (grave pour les insultes, plus aigu pour les encouragements) et le choix des spectateurs montrés pendant la séquence amènent à une conclusion simple : les hommes qui portent des t-shirts de CM Punk (donc, dans l’insconscient collectif, les « vrais » fans de catch) n’aiment pas Cena, mais les femmes l’apprécient. Façon détournée de mettre en doute la virilité de John.


S’ensuivit directement une promo du Marine, venu expliquer que non, il ne comptait pas changer, qu’il resterait fidèle à ses valeurs et que son caractère serait toujours le même. Traduisons ça en termes techniques : « non, je ne deviendrai pas heel ». Il est assez rare qu’un catcheur évoque aussi clairement un éventuel changement de caractère, et la WWE ne cesse de jouer avec ce fameux heel-turn hypothétique et tant attendu. Ce segment est finalement assez finement mené, les propos de Cena pouvant avoir un sens à la fois en kayfabe et en dehors. Comme l’on pouvait s’y attendre, Cena fut interrompu par la voix sépulcrale de Kane qui ne résista pas au plaisir de se foutre de sa gueule.


Toute cette histoire, décidait Laurinaitis, se réglerait dans le main-event de la soirée, au cours d’un match à trois contre trois par éléminiation. Nous aurons d’un côté Cena, le Big Show et Zack Ryder et de l’autre Kane, Mark Henry et Jack Swagger. Il est frappant de constater que Ryder a l’air de plus en plus fraichement accueilli par le public : lui reproche-t-on son association avec Cena ? Ses piètres qualités de catcheur ? Sa coupe de cheveux ? Son personnage de débile léger ? La question reste posée.

 

 

Ou alors, c'est de la jalousie.

 


On pouvait jusqu’à présent se demander quel était le statut exact de Kane. Ne s’étant attaqué qu’à Cena depuis son retour et le Marine suscitant les réactions que l’on sait, il n'était pas aisé de déterminer si le Big Red Monster était à considérer comme un heel ou comme un face. La réponse sembla un temps évidente, puisqu'il était dans l'équipe des heels. Sauf qu’au moment du match, il ne se montra pas et c’est un David Otunga toujours aussi élégamment vêtu qui vint annoncer que le Gros Rouge n’ayant visiblement pas décidé de participer au combat, l’affrontement serait un match à handicap à trois contre deux. Ça sentait quand même le piège.

 

Cena s’amusa à placer des mouvements qu’on n’a pas l’habitude le voir exécuter comme un saut chassé. Le cas d’Henry est du Big Show fut rapidement réglé : ne pouvant se contrôler, ils finirent par se frapper à coups de chaise et se firent rapidement disqualifier tous les deux. Swagger resta donc seul contre deux adversaires, on ne donnait alors pas cher de sa peau et avait bien raison : Cena le mit rapidement au tapis grâce à un attitude adjustment.


La musique de Kane retentit alors, Cena se dirigea vers l’entrée pour en découdre, mais le monstre masqué sortit d’un trou percé dans le plancher du ring et s’en prit à Zack puis à John. On nous a déjà fait le coup du trou dans le ring plusieurs fois, mais il faut reconnaître que c’est toujours aussi efficace. Kane essayé ensuite d’entraîner Ryder dans son antre, Cena l’en empêcha et l’émission s’acheva sur le plan de hautes flammes s’échappant du trou percé par Kane, retourné dans les profondeurs de la Terre.

 

 

John, je descends dans les entrailles chtoniennes de la Terre aux reliefs cyclopéens dont l'esprit humain ne peut appréhender l'indicible horreur sans perdre la raison. Je te rapporte quelque chose ?

 

 

En tant que grand fan de Kane, la feud m’intéresse beaucoup, mais je regrette malgré tout que le main-event ne soit pas réservé aux matchs impliquant les champions en titre. Soyons indulgent cependant, et considérons que le déchirement du plancher du ring imposait pour des raisons purement pratiques de conclure Raw sur cette séquence.


Quoiqu’on aurait aussi pu garder pour la fin le grand événement de ce Raw. Je veux bien sûr parler du retour du mec mystérieux qui avait été mystérieusement annoncé dans des vidéos mystérieuses. D’ailleurs, c’était qui le gars qui est revenu ? Nous l’allons découvrir maintenant.


Au bout d’une heure d’émission, le spectateur découvre une nouvelle vidéo mettant en scène les deux enfants qu'il connaît maintenant bien.


Musique inquiétante. Gros plan sur les yeux de psychopathe du garçon.

 

« A familiar force shall arrive ».

 

Succession de plans fixes sur les enfants et sur leur salle de classe. Les couleurs sont désaturées, à la limite du noir et blanc. L'atmosphère est oppressante.

 

« She holds the mystery of my rebirth ».

 

Des oiseaux s’envolent, effrayés. La fillette chuchote quelques mots à l’oreille du garcon.

 

« She has spoken ».

 

La fille nous fixe d’un regard glaçant, face caméra.

 

« It is time ».

 

Images épileptiques d’arbres et d’un caddie de supermarché brisé.

 

« The end of the world as you know is here. »

 

Des balançoires vident bougent sous un ciel gris et pâle. Le sourire de la fille meurt lentement.

 

« Now ».

 

Plan de plusieurs secondes sur la table et la chaise, désormais vides. Fin de la vidéo. Le spectateur est hypnotisé. Il respire difficilement : son cerveau est trop absorbé par l'écran pour continuer à assurer les fonctions vitales.

 

Retour dans la salle, plongée dans le noir. Bruits de tremblement de terre. On voit furtivement un spectateur brandir une pancarte ornée de deux lettres et d’un chiffre, et l’on se dit, le cœur battant, que les rumeurs étaient vraies.

Puis c’est le silence et les ténèbres. Longs. Interminables. Un cri naît au milieu du public et se propage immédiatement à toute la salle. Une lettre. Un chiffre. Une lettre.

Une forme lumineuse clignotante apparaît. On comprend qu’elle a la forme d’un torse humain et de deux bras tendus.

Mon cœur s’accélère. Mes yeux deviennent humides. Les ongles de mes poings trop serrés meurtrissent ma chair. Je saigne comme un goret qu'on égorge. Le coussin que je tenais dans ma mâchoire serrée explose, libérant une pluie de plumes dans mon appartement. Je transpire. Ma bouche, que je ne contrôle plus, émet de petits couinements. Je commence à convulser. Mes jambes se mettent à trembler et renversent ma table basse. Je me retiens de me pendre avec une ceinture pour mettre fin à cette insupportable pression.

 

Oui, il faut reconnaître que la WWE sait y faire quand il s’agit de mettre en scène un retour.

Et là, paf. Révélation. Des feux d’artifice éclatent en même temps qu’une musique que nous n’avions pas entendue depuis trop longtemps. C’est lui. C’est bien lui !

 

 


Sarah, c’est bon, tu peux revenir.

 

 

Chris Jericho est de retour à la WWE. Vous avez bien lu. Nous l'espérions depuis des mois. Nous avons vu les rumeurs se propager sur Internet mais nous avions peur d'y croire, peur d'être déçus. Et pourtant, c'est arrivé. Répétons-le encore.

 

Chris Jericho est de retour à la WWE.

 

Sous des acclamations hystériques, Y2J harangue la foule. Il s’amuse à provoquer les cris, sourit, savoure le moment. Il redescend même du ring après y être monté pour taper dans les mains des spectateurs du premier rang. Et puis la musique s’arrête. Un large sourire niais naît sur le visage des spectateurs : le grand Jericho a un micro à la main et va faire une de ces promos brillantes dont il a le secret. Il retarde le moment, tant attendu, le bougre ! Ce mec est vraiment trop sympa. Il court à chaque coin du ring, hurle des « oh yeah » et autres « come on baby ».


Même le Rock n’a pas attendu aussi longtemps avant de parler lors de ses derniers retours. On commence d'ailleurs à se dire que Jericho en fait un peu trop.


Finalement il se fige et approche le micro de sa bouche. On l’entend reprendre bruyamment son souffle. Il attend. Et puis, un bruit sourd : le meilleur orateur de la WWE vient de faire tomber son micro. Il reste figé, les bras en l’air, pendant plusieurs secondes.


On en est désormais certain : ce n’est pas là l’attitude d’un catcheur adulé qui savoure la joie de retrouver son public. Que se passe-t-il ?


Nouveau cri de joie. Y2J secoue les cordes, hurle à nouveau. Son attitude n’est pas normale, il ressemble à une mauvaise caricature. Le public commence à s’en rendre compte : on entend quelques cris de mécontentement. Vociférant toujours, criant des « yeah yeah yeah » dépourvus de sens, un sourire forcé au visage, il descend encore une fois du ring, déconne avec un cameraman et se dirige vers la sortie. Il joue encore avec la foule, s’attirant des hourras en désignant du doigt une partie de la salle, mais le public ne réagit plus aussi bien. Enfin, Jericho se fige à nouveau. Il est là depuis près de dix minutes et n'a rien dit, rien fait. Le public, frustré, le hue. Le héros tourne le dos et s’en va.

 

J'ai d'abord été très déçu et étonné par cette séquence à première vue inepte. Et puis j'ai réfléchi. Et je me suis rendu compte que le type qui l’a imaginée, que ce soit Jericho lui-même ou un booker, a vraiment tout compris au catch.


Imaginez que vous soyez responsable d’une grande fédération de catch et que vous ayez pour projet de faire revenir, après une absence de plus d’un an, l’une de vos plus grandes stars. Et imaginez que ce type, parti alors qu’il était heel, vous ayez envie qu’il revienne toujours en heel. Eh bien là, vous avez un problème : le gars est tellement bon sur le ring et micro en main, il a tellement manqué aux fans que vous savez pertinemment que, quoiqu’il fasse, il sera applaudi et considéré automatiquement comme un face. Que faire ? Lui demander de revenir en costume et de traiter le public de gros cons de sycophantes, comme il savait si bien le faire ? Bien sûr que non : le risque de ratage est trop grand : le public sera tellement content de retrouver ce personnage qu’il adorait détester qu’il risque d’exprimer sa joie. Des hourras pendant la promo d’un heel, ça n’est pas envisageable.


Vous avez alors une idée : vous allez manipuler le public comme on ne l’a jamais manipulé. Vous allez demander à votre gars de jouer son rôle de heel à la perfection, tout en faisant croire qu’il est sorti de ce rôle. Vous allez lui mettre une veste clignotante ridicule, vous allez lui demander de jouer à fond le rôle du face sympa et content de retrouver ses fans. Tellement à fond que les fans vont petit à petit réaliser qu'on se fout de leur gueule.


Ce soir, nous avions cru voir Christopher Irvine venir avec plaisir retrouver le monde du catch. Nous avons en réalité vu Chris Jericho, le Chris Jericho heel que nous aimons tant, faire la preuve que ce qu’il ne cessait de répéter avant son départ était vrai : les fans sont des hypocrites, des ingrats, des imbéciles incapables de réfléchir et prêts à changer complètement d’attitude envers n'impote quel catcheur pour peu qu'il soit un peu démago.

 

Et le pire, c’est qu'il a parfaitement raison : la pire ordure peut parfaitement devenir en quelques secondes une idole respectée et adulée si elle se retourne contre une autre ordure. C’est un peu comme si dans la vie réelle, un tueur devenait automatiquement un héros après avoir exécuté un autre assassin.


En moins de dix minutes, Chris Jericho a réussi ce soir à entrer dans la salle en top face et à faire un heel-turn sans prononcer une seule phrase complète  le tout en se montrant constamment chaleureux.  Qui a déjà réalisé un tel exploit ?

 

Jericho est de retour et c'est toujours un génie du catch.


Reste à savoir ce qu’on va faire de lui. Je vois quatre options intéressantes. Ce retour de Jericho a été marqué par son interaction avec le public. À ce titre, deux catcheurs possèdent un statut particulier qui pourrait donner lieu à une feud passionnante.


Il y a d’abord CM Punk. Le favori actuel de la foule, l’homme que tout le monde soutient, qui soulève les foules par sa seule présence, le nouveau champion du peuple, serait l’adversaire idéal pour un Y2J dénonçant justement l’attitude servile et volage de la foule.


Dans le même ordre d'idée, il pourrait aussi joindre son intelligence à la force brute de Kane dans une feud contre Cena. L’ancien héros est aujourd’hui de plus en plus détesté par les fans, et Jericho serait le Charon idéal pour lui faire traverser l’Achéron du heel-turn en le persuadant que tous ses beaux principes ne lui ont attiré que la haine d’un public ingrat.


On peut aussi imaginer qu’il va se lancer à la conquête du titre détenu par Daniel Bryan (pourquoi pas par une victoire au Royal Rumble), ce dernier étant sans rivalité fixe en ce moment. Ceux qui ont regardé leur match aux débuts de NXT, à l’époque où l’émission était encore regardable, ne peuvent que frétiller de plaisir à l’idée de voir ces deux-là livrer un match à Wrestlemania. Cette option serait plus classique mais néanmoins alléchante.

Mais c’est ma dernière hypothèse qui, bien que la moins probable, a ma préférence. Rappelez-vous : lors de son départ en 2010, Chris Jericho a déclaré partout qu’il ne souhaitait pas célébrer son départ par un hommage larmoyant à la Ric Flair ou Shawn Michaels.

 

Et si ce soir nous avions assisté tout simplement aux adieux du grand Jericho, à sa toute dernière apparition à la WWE ? Si cette séquence avait été le dernier tour de piste d’un catcheur génial venu tout à la fois jouer une dernière fois son rôle de heel et en même temps apprécier les acclamations de ses fans ? Le prochain Raw nous en dira plus, mais si cette dernière hypothèse venait à se confirmer, elle serait la preuve ultime de ce  que nous savions déjà tous : Chris Jericho est l’homme le plus classe du monde.


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