De la bonne télé, des storylines cohérentes et des matchs : un vendredi comme les autres

Pour beaucoup de Parisiens, la télévision est la seule fenêtre ouverte sur le monde, et cette fenêtre est d’autant plus nécessaire que la maison est plus petite.

Chris Marker, Le joli mai

 

Bonjour à toutes et tous et bienvenue à la Spanish Announce Table, le seul endroit où sont nées les légendes, où les carrières ont été brisées et où on va faire un article un peu différent cette semaine.

 

 

Scoop : Destruction est fan d'Eurodance néerlandaise circa 1992.

 

 

Nalyse du Smackdown du 27 août

 

Pour beaucoup de Parisiens, la télévision est la seule fenêtre ouverte sur le monde, et cette fenêtre est d’autant plus nécessaire que la maison est plus petite.

Chris Marker, Le joli mai

 

Bonjour à toutes et tous et bienvenue à la Spanish Announce Table, le seul endroit où sont nées les légendes, où les carrières ont été brisées et où on va faire un article un peu différent cette semaine.

 

 

Scoop : Destruction est fan d'Eurodance néerlandaise circa 1992.

 

 

Nalyse du Smackdown du 27 août

 

 

Oui, parce que d'habitude, on passe notre temps à vous faire une belle review où on a analysé tous les aspects du show qu'on regarde à l'antenne et bien séparé les ingrédients de la mayonnaise finale. Et on vous les ressert, émulsionnés à notre sauce CDC parfois piquante, parfois acide, mais toujours meilleure que la sauce BBQ de ce bon vieux JR. Mais là, non, un peu parce qu'on a la flemme mais aussi parce qu'on est sûr que ça va vous intéresser, on va prendre le show sous ses divers aspects en les séparant délibérément.

 

Bon, la première chose, et peut-être la plus importante à comprendre à propos de Smackdown, c'est que c'est une émission de télé, écrite comme toute émission de télé, avec des temps forts stratégiquement choisis et des temps « moins forts » – tu noteras, cher lecteur, le pléonasme pour parler des matchs de Kelly Kelly – qui ne sont là que pour faire patienter le spectateur. De ce fait, on a donc assez facilement la hiérarchie des choses importantes à la WWE rien qu'en regardant qui apparaît à quel moment. Et il y a trois grands créneaux stratégiques pour une émission comme Smackdown : la partie introductive, le final et tout ce qui va se dérouler au niveau du changement d'heure.

 

 

Et entre deux segments du show, il y a des pubs pour un après-shampooing qui rend vos cheveux doux et soyeux.

 

 

On peut donc assez vite comprendre que seuls Bret Hart, Christian, Mark Henry, Sheamus (1er segment : promo in-ring, début du show), Daniel Bryan (2ème segment : premier match contre Christian) et Randy Orton, Ted Di Biase et Cody Rhodes (segment de milieu de show) comptent réellement à l'heure actuelle dans le show bleu. D'ailleurs, c'est dans ce pool de talents que la WWE puisera pour le main-event du soir avec un Mark Henry vs Sheamus, match revanche de leur affrontement en Pay Per View, un match attendu puisqu'il a même bénéficié de l'effet d'annonce et a été promu plus tôt dans la semaine lors des autres shows, l'affiche étant censée donner envie au spectateur de ne pas rater l'épisode de vendredi.

 

Avant de diverger quelque peu et de s'éloigner du pur aspect télévisuel du show de ce soir, soulignons aussi le sublime package vidéo que la WWE a diffusé avant le main-event : un vrai bijou de storytelling qui peignait le portrait du Mark Henry destructeur qui a semé le chaos sur sa trajectoire depuis deux mois. Si, par hasard, un spectateur novice découvrait là pour la première fois Mark Henry, le portrait du personnage était tracé à merveille : une brute épaisse qui ne s'embarasse pas de diplomatie et fait réellement peur. Le gimmick colle d'autant mieux au personnage que c'est probablement le sentiment qu'inspire Mark Henry à tous ceux qui le croisent « en vrai » et un clip comme celui-ci permet de faire oublier au spectateur fidèle qu'Henry a longtemps été un personnage abonné aux seconds rôles et au job squad de la WWE. Il est avant tout une vraie force de la nature, capable de plier des poêles à frire en deux avec autant de facilité que le commun des mortels plierait une feuille de carton un peu épaisse.

 

 

D'ailleurs si Mark Henry porte une barbe, c'est parce que ce sont ses poils qui coupent le rasoir et non l'inverse.

 

 

Si j'ai choisi d'autant m'éterniser sur l'aspect télévisuel du show de ce soir, ce n'est pas tout à fait un hasard. Le Friday Night Smackdown tel qu'on le connaît est, depuis quelques jours, en grand danger. Le produit, malgré les fanfaronnades de la WWE, n'est pas énormément regardé. Le show a, depuis un an, trouvé sa place et son public sur Sy Fy mais il est néanmoins sur une chaine assez peu accessible pour l'Américain moyen et c'est d'autant plus génant que l'UFC a annoncé qu'à la rentrée, son émission phare, Ultimate Fighter, sera diffusée au même horaire par le mastodonte télévisuel que représente la Fox.

 

Le péril est donc réel pour la WWE qui risquerait de voir une partie de son public s'envoler et l'émission de la semaine prochaine, diffusée en direct mardi et rediffusée vendredi en différé, pourrait bien être un vrai galop d'essai de la WWE afin de se trouver un nouvel horaire de programmation qui pourrait lui servir de repli en cas de chute brutale de son audience du vendredi soir. A suivre donc.

 

 

En attendant ce jour, les Cahiers du Catch continuent à faire leur publicité clandestine sur l'antenne de la WWE.

 

 

Penchons-nous maintenant sur tous ceux à qui la WWE accorde moins d'importance : les divas, d'abord, avec ce soir, un Tamina vs Kelly Kelly tout ce qu'il y a de plus fade. Je sais bien que c'est un peu facile de râler à propos de la storyline actuelle des divas parce qu'après tout, c'est toujours mieux d'avoir un angle que rien du tout. Mais il n'empêche que tout ça est assez confus. Kelly Kelly passe ses lundis à RAW à jouer la babyface qui s'autorise des mouvements heels (attaquer la Bella Twin non impliquée dans le match, ce lundi, attaquer Beth dans le dos avant le dernier PPV) et, en totale contradiction, ne joue pas dans ce registre à Smackdown. Et ses antagonistes (Beth et Natalya) n'ont toujours pas expliqué les raisons de leur courroux à son propos ou alors de manière si confuse (comme à RAW ce lundi) qu'on ne peut rien tenir pour acquis. Enfin, patientons encore quelque temps et prions pour que la WWE finisse par s'intéresser à la division de manière plus consistante.

 

A côté de ce match sans grand intérêt, le Great Khali vs Ezekiel Jackson faisait presque office de véritable petite pépite. Et pourtant, vu le casting, il y avait de quoi redouter le pire : Big Zeke n'a pas réussi , lors de son run intercontinental, à capitaliser sur les espoirs qu'on pouvait placer en lui et il s'est révélé être un lutteur assez peu enthousiasmant, notamment par la faute d'un move-set assez unidimensionnel qui n'insistait que sur sa puissance et ne lui laissait guère d'occasion de montrer d'autres qualités dans le ring. Quant à Khali, comment dire … C'est The Great Khali, un monstre de foire, mais certainement pas un lutteur et sa présence dans le ring est toujours aussi incongrue, compte tenu d'une motricité assez aléatoire.

 

 

Le Great Khali, ayant réussi à faire cinq pas dans le ring sans avoir l'air de trébucher, célèbre sa victoire en levant les bras au ciel.

 

 

Et pourtant, le match de ce soir m'a enthousiasmé et a réellement dépassé mes attentes : Jackson a joué une bonne partition de face en péril, a su faire preuve de résistance et a même réussi à décrocher la victoire suite à une intervention extérieure de Jinder Mahal, dans le rôle du manager de Khali qui se fait frapper par inadvertance par son protégé.

 

Tiens, parlons-en de Jinder Mahal, car il va rejoindre la courte liste des gens qui ont débuté à la WWE cette année mais qui laissent une impression pour le moins mitigée. Avec Kharma, Sin Cara première version et Mason Ryan, il constitue le quatrième élément de ceux dont les premières armes à la WWE se sont terminées en queue de poisson pour diverses raisons. Et sans vouloir m'acharner sur les gens en charge des talent relations, il faut quand même bien reconnaître que c'est plus qu'inquiétant. Mahal n'est actuellement vraiment intéressant à l'antenne que dans un rôle de Manager de Khali. Or la WWE avait déjà un tel atout dans son écurie auparavant et son apport au produit global est donc très limité.

 

 

Ouais mais n'empêche que même en n'étant que manager de Khali, je suis bien parti pour être Rookie of the Year vu la concurrence.

 

 

En revanche, je ne tarirai pas d'éloges sur Sin Cara 2.0. Hunico a réussi à faire sous le masque du catcheur sans visage ce que Mitisco n'avait jamais vraiment pu achever : la transition entre les rings de Lucha et ceux de la WWE. Le style est fluide et télégénique, spectaculaire mais jamais hasardeux et le match de ce soir, en forme de squash d'Heath Slater, en était la meilleure preuve. J'attends avec impatience le match de la semaine prochaine entre Sin Cara et Alberto Del Rio, qui pourrait être très bon dans le ring et même, qui sait, développer la storyline puisqu'un richissime adversaire ayant une aversion pour les catcheurs masqués constituerait une bonne base pour un éventuel angle impliquant deux Sin Cara, l'un heel et l'autre babyface.

 

 

Il a quand même bien fait de mettre un masque, Sin Cara.

 

 

Terminons maintenant cette partie dédiée aux storylines annexes avec Wade Barrett, qui avait ce soir un match contre un jobbeur local. C'est un combat qu'il a refusé de mener, s'estimant bien trop talentueux pour affronter une si faible opposition. Si le mic-skill de l'Anglais a fort bien vendu son attitude de heel prétentieux, j'avoue que tout cela me laisse malgré tout fort dubitatif parce que l'avenir semble un peu bouché pour Barrett. Si ce soir, il a effectué un joli coup d'attente, il faut vite que les scénaristes lui donnent quelque chose à faire, soit en remettant à flot l'angle que le Britannique avait engagé avec Daniel Bryan, soit, plus probablement en lui faisant effectuer la même routine face à un autre membre du roster de Smackdown, qui ne serait plus un random jobber et prendrait Barrett en grippe pour lui prouver qu'il est de son niveau. La liste des gens correspondant à ce profil de babyface en attente d'une feud dans le ring est assez longue (Zack Ryder, éventuellement, Trent Barretta) mais je crois que c'est un rôle qui conviendrait à merveille à Johnny Curtis, qui mériterait bien cela en tant que vainqueur de NXT.

 

Passons désormais aux trois matches mis en valeur pour la soirée en commençant avec le Ted Di Biase vs Randy Orton de milieu de show. Précédé par une promo de Cody Rhodes, le match fut très plaisant et a bien démontré que l'alchimie in-ring créée lors de la Legacy existait toujours. La victoire, logique, du champion en titre a permis à la WWE de passer la seconde en ce qui concerne l'association Di Biase – Rhodes qui semble se terminer. La conclusion de ce soir avec un Cross Rhodes et un sac en papier sur la tête du perdant va, en tous cas, dans ce sens. Très bon match, bien mis en valeur et avancement d'une storyline avec le titre intercontinental possiblement dans la balance. Rien à redire, donc.

 

 

Ted, j'ai étudié tous ses matchs en vidéo. Des heures de visionnage de DVDs, et je vais te donner un conseil basé sur cette expérience incommensurable : méfie-toi de sa prise qui s'appelle RKO, ça a l'air super puissant ce truc.

 

 

Le segment introductif, chargé de donner le fil conducteur de la soirée, voyait Bret Hart prendre pour un soir et à domicile la place de Teddy Long. Le General Manager officiel de Smackdown était probablement parti en vacances dans la suite 2806 du Sofitel de New-York avec Aksana, histoire de lui démontrer que son nom de famille est plus que mérité. Et Bret Hart, dans le rôle d'intérimaire, a permis au public de sa home-town, toujours particulièrement imprévisible, d'obtenir un feel good moment et une grosse ovation à peu de frais.

 

C'était d'autant plus important qu'il allait être confronté à Christian, un autre héros canadien qui, lui, devait travailler à contre-emploi. L'ex-champion, en terme de storyline, ne pouvait pas se permettre de recevoir le soutien du public, vu qu'il allait réclamer son rematch pour le championnat du monde qu'il a perdu grâce à l'aide ses avocats. Au terme d'une petite passe d'armes avec la légende vivante, Christian réussissait proprement à se faire conspuer et à obtenir un match en cage contre Orton pour la semaine suivante. Cela permit aussi à Mark Henry puis Sheamus de faire une apparition histoire de teaser le main-event du soir avant d'enchainer après la première coupure pub sur l'opener.

 

 

Pour ceux qui l'ignoreraient, quand il y a une coupure pub pendant les matchs, les catcheurs en profitent pour faire une petite sieste.

 

 

Christian vs Daniel Bryan Danielson, donc. Là aussi un très beau match qui a bien mis les deux adversaires en valeur avant de se terminer sur un Killswitch victorieux. Mais le propos principal du combat était quand même de raconter une histoire à propos du perdant du soir : Bryan. Match après match, la WWE est en train de nous le présenter comme quelqu'un qui est au niveau de gens qui sont de plus en plus haut dans la carte : Christian, ex-champion cette semaine, Del Rio, champion en titre la semaine précédente.

 

Le travail de construction de Mr Money In The Bank est donc en marche et il porte lentement se fruits, malgré les défaites. Reste à savoir à quel point la WWE accorde réellement de l'importance à l'American Dragon. La réponse viendra la semaine prochaine lors du Smackdown live de mardi, la WWE nous promettant une carte de supershow avec des membres des deux rosters, on pourra voir si elle continue à l'aligner face à des candidats à haut profil (un CM Punk vs Bryan serait une excellente idée par exemple mais le Miz ferait bien l'affaire aussi) ou à des upper-midcarders n'ayant jamais touché un titre suprême (du genre de Dolph Ziggler ou de R-Truth).

 

 

Si la semaine prochaine la WWE nous sert un Bryan / JTG, vous aurez le droit de crier au scandale et à l'inconsistance du booking.

 

 

Pour terminer, le Main-event entre Henry et Sheamus était une sorte de petit casse-tête dont les bookers se sont fort bien sortis. L'Irlandais  ayant été battu en Pay Per View, même par disqualification, il était impossible de le faire perdre ce soir. Et avec Mark Henry, nouveau number one contender et surfant à merveille sur le push de monster heel dont il bénéficie, il était inconcevable de terminer l'émission sur une situation en sa défaveur. Le match se soldera donc par un décompte à l'extérieur d'Henry suite aux assauts de Sheamus qui l'enverra d'un Brogue Kick sous la table des commentateurs. Mais le duel se prolongera une fois la cloche sonnée et se terminera par un World Strongest Slam sur le marche-pied en acier menant au ring, permettant à la force de la nature qu'est Henry de montrer qu'il est aussi dominateur que dépourvu de pitié. Histoire de ne rien gâcher, l'affrontement entre les deux fut bon, voire même très bon pour un match entre big men, ce qui est suffisamment rare à la WWE pour être souligné.

 

 

Mark Henry est tellement déçu de sa défaite par count-out qu'il a décidé d'appliquer une prise de l'ours au fauteuil qui en est responsable.

 

 

Et donc ce Main-Event a fort bien terminé un show très bien construit, très solide en termes d'action in-ring et de promo dans tous ses points forts. Les points les moins mis en valeur, même s'ils étaient inférieurs en terme de qualité, offraient largement plus que le minimum syndical, certains étant même grâce à un boooking astucieux (Jackson vs Khali) largement supérieurs aux attentes les plus folles. Encore une fois, la WWE a fait un très bon boulot avec ce Smackdown et il reste maintenant à attendre et espérer que face aux challenges télévisuels qui s'annoncent pour le show bleu, celui-ci continue le boulot de la même manière en ne perdant ni son identité, ni sa cohérence. La première étape de ce chemin commence mardi en direct et devrait déjà nous fournir quelques éléments importants.

 

 

Stay tuned !


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