Passées les limites, il n’y a pas grand chose

I am big! It's the pictures that got small.

Norma Desmond, Sunset Boulevard
 

Bonjour à toutes et tous et bienvenue à la Spanish Announce Table, le seul endroit où sont nées les légendes, où les carrières ont été brisées et où cette semaine, on a assisté à l'un des plus beaux hold-ups de l'histoire récente de la WWE.

 

 

Alors, voilà, je te le signe ton autogra… RKO out of nowhere…

Ah, ah ! je t'ai eu gamin !

 

 

Nalyse du RAW du 23 mai

I am big! It's the pictures that got small.

Norma Desmond, Sunset Boulevard
 

Bonjour à toutes et tous et bienvenue à la Spanish Announce Table, le seul endroit où sont nées les légendes, où les carrières ont été brisées et où cette semaine, on a assisté à l'un des plus beaux hold-ups de l'histoire récente de la WWE.

 

 

Alors, voilà, je te le signe ton autogra… RKO out of nowhere…

Ah, ah ! je t'ai eu gamin !

 

 

Nalyse du RAW du 23 mai

 

Autant le dire tout de suite, le show a été volé par un seul catcheur mais on va d'abord s'éterniser sur tout le reste de l'épisode de RAW qui était plus que médiocre et on chantera les louanges de la star de la soirée plus tard, en fin d'article, histoire que tu le lises jusqu'au bout.

 

Alors, commençons par le plus grand n'importe quoi du show : l'arrivée de Michael Cole dans le ring suite à la veille et à sa défaite humiliante au goût de petit salé sauce Barbecue. Le heel numéro un du show le plus important de la WWE a alors délivré un discours où il disait en substance qu'il était désolé et que maintenant, il le referait plus, machin tout ça… et que tout serait comme avant dorénavant. Et c'est exactement ce qui s'est passé pour le reste du show.

 

Bon, alors, OK. Je veux bien que cette feud ait été une purge et qu'elle s'achève enfin. Mais, quand même, la WWE abuse sérieusement. Annuler par une sorte de coup de baguette magique tout ce que cet angle a pu impliquer en termes d'évolution des personnages de Cole et de Lawler, c'est franchement un grand n'importe quoi. Faire revenir leurs relations à la normale et s'arranger pour que rien ne transparaisse de cet angle dans deux semaines après plus de six mois de feud, c'est prendre le public pour des cons. Et accessoirement, l'injurier si jamais il a eu la faiblesse de suspendre un instant son incrédulité (ce qui est quand même le but premier d'une storyline de la WWE).

 

 

Si vous pensiez que c'était ça le plus dur à avaler dans cette feud, vous vous étiez trompés, ce soir, c'était pire.

 

 

Zéro continuité, donc, ça mériterait presque qu'on se demande sérieusement s'il y a des gens qui écrivent les shows de la WWE. Mais d'autres séquences très vite vont intervenir pour nous donner la réponse. Et elle est négative : non, il n'y a personne qui soit capable de maintenir à ce show un semblant de cohérence. La preuve ? Vous l'avez en regardant le segment des divas qui était probablement ce qu'on a vu de plus contreproductif en terme d'établissement d'un récit depuis des lustres.

 

Match de divas en tag-team : quatre contre quatre. Faces (Beth, Gail, Eve & Kelly Kelly) contre Heels (les Bella Twins, Maryse & Melina). Il dure une grosse quinzaine de secondes avant d'être interrompu par Kharma. Et aussitôt les divas, interrompues dans leur match, jouent leur rôle à merveille, passant de la peur à l'instinct de survie, s'organisant plus ou moins pour préparer une riposte en quadrillant le ring. Celle qui a été jusqu'à maintenant dépeinte comme un monstre sans pitié entre alors dans l'arène entourée par huit poupée siliconées. Elle s'agenouille et pleure. Oui, cher lecteur, tu as bien lu : elle pleure.

 

 

Quand Kharma pleure, ce sont tous les suiveurs de la WWE avec plus de 15 de QI qui pleurent avec elle.

 

 

Je ne vais pas juger la storyline avant même qu'elle ne démarre vraiment mais là j'avoue que j'ai quand même du mal à comprendre. Le personnage de Kharma fonctionnait très bien avec le public et il n'y avait pas du tout besoin de modifier le personnage en ajoutant un aspect psychologique (probablement quelque chose du genre "je suis un bully qui abuse de sa force seul mais s'écroule face au nombre"). C'est d'autant plus dommage que Kharma est une catcheuse qui, à mon avis, n'a pas non plus une durée de vie extrêmement longue à la WWE (dans le sens où elle ne pourra à mon avis survivre qu'à un nombre assez limité de modifications de la psychologie du personnage) et que là, la WWE a déjà décidé de changer son fusil d'épaule avant même que celle que la WWE n'ose pas appeler diva ait eu un match. Quand on voit que son personnage de monster heel destructeur était nouveau et jamais vu (ou presque) dans la division féminine de la WWE, on a quand même de quoi être dubitatif…

 

Ceci dit, on juge les très grands catcheurs à leur faculté à faire fonctionner des angles qui sont, a priori, incapables de fonctionner selon la logique et les règles de l'art en terme d'écriture. Si Kharma/Kong est une très grande dans ce business, elle n'aura aucun mal à donner suffisamment de profondeur à cette partition foireuse pour que le public y adhère. Mais il n'empêche que la WWE a fait là un pari très risqué et elle ne lui favorise pas du tout le travail.

 

 

Bon, les gars, j'ai reçu le script du show de ce soir. C'est court et ça dit de vous démerder sans la creative team. Voilà, voilà !

 

 

Histoire de compléter l'inventaire des décisions foireuses, parlons maintenant des conséquences du Pay per View de la veille sur le Miz. Et commençons par dire que l'ex-champion n'a pas vraiment bénéficié du booking d'un I Quit match qu'on aurait cru scénarisé par un enfant de six ans tant les ressorts psychologiques en jeu étaient pauvres. Pour moi, ce match est une catastrophe. Qu'il présente Cena comme indestructible, passe encore, ce n'est pas une nouveauté et, visiblement, c'est ce que son public attend. Mais il a surtout fait passer le Miz pour un idiot (il avait annoncé de l'inédit et il a repris une ruse déjà employée auparavant par The Rock, un type qu'il connaît bien pour l'avoir croisé il y a peu) et pour un champion en carton (vu que le come-back du Marine et l'abandon du Miz s'est effectué bien trop vite à mon goût).

 

Histoire de compléter le tableau, l'ex-most-must-see-champion était furax ce soir contre Riley et avait décidé de le licencier en public, histoire de bien l'humilier. Et son ex-apprenti lui a infligé une bon beat-down bien senti qui l'a laissé inanimé au milieu du ring ! Really ! Really ? comme dirait le Miz lui même. On le fait champion pendant des mois et quand son disciple (qui n'a pas gagné un match depuis des lustres) se rebelle, la scène se termine avec le Miz à terre et Alex Riley qui sort vainqueur et sous les vivas de la foule, près à re-débuter à Smackdown en babyface ?

 

Le bilan de cette séquence est cruel et la WWE aurait voulu renvoyer le Miz en midcard qu'elle n'aurait pas fait autrement. Et si on ajoute à ça que Riley n'est pas à mon avis le type qui mériterait le plus de bénéficier des royalties du beatdown d'un ex-champion encore number one contender la veille – surtout avec ses performances in ring assez contestables et son sens du timing en décalage horaire – j'ai vraiment du mal à voir de la continuité dans le présent et le futur. Enfin, là aussi, comme pour Kong, espérons qu'une storyline solide (à base de raids du Miz à Smackdown qui irait pourrir la vie de Riley) sorte de cette impasse et que les acteurs soient suffisamment bons pour faire marcher un angle qui me semble mal parti.

 

 

Après une victoire en main-event de Wrestlemania suivie par un beatdown destructeur d'Alex Riley, le Miz prépare déjà activement sa prochaine feud.

 

 

Passons aux matchs, maintenant. Et là, non plus, il n'y a pas vraiment matière à se réjouir : Kofi Kingston vs Drew McIntyre et Jack Swagger vs Evan Bourne. Est-ce que les matchs étaient mauvais ? Non, bien sûr, plutôt bons même et chacun a réussi à mettre en valeur les qualités des protagonistes, ce qui est d'autant mieux joué que le temps était très limité (six à huit minutes à eux deux). Mais il faut quand même se rendre à l'évidence : aucun de ces catcheurs n'était à l'affiche du Pay Per View de la veille et les deux victoires de Swagger et Kingston n'étaient là que pour rappeler leur existence au public sans totalement détruire leurs adversaires. Bourne, malgré une défaite, parvient à gagner la sympathie de la salle en tirant avantage de la vanité de son adversaire après le match. Et McIntyre, par son bon niveau in-ring, peut continuer à se positionner pas loin du titre, malgré sa défaite du soir.

 

 

Merci, Kofi. Tiffany et moi sommes en instance de divorce.

Et j'ai vraiment besoin d'un calin, là, maintenant…

 

 

Pour l'instant, ça nous fait un bilan très pauvre : deux matchs réussis mais sans la moindre storyline en toile de fond, une conclusion de feud abracadabrantesque, deux angles extrêmement casse-gueule sur deux têtes d'affiche potentielles des deux rosters. Heureusement la WWE nous a quand même offert quelques points de satisfaction.

 

En premier lieu, la présence de Bret Hart en début de show et en guise de special guest referee en main event. Elle pourra paraître incongrue à beaucoup mais le fait de voir Bret dans un ring de la WWE un 23 mai faisait plaisir, surtout d'ailleurs parce que la date était loin d'être innocente et faisait écho à la tragédie qui avait coûté la vie à son frère Owen, il y a douze ans. C'était un très bon moyen de rendre hommage à la victime de cette tragédie sans en faire des tonnes et ça tombait d'autant mieux que la WWE avait une autre tombe à fleurir avec celle du Macho Man.

 

 

J'ai envie d'écrire "Sans légende" sous la photo mais en réalité, il y a une légende sur la photo.

 

 

Disons le tout net, la WWE a fait exactement ce qu'il fallait pour rendre hommage à Randy Savage via un très bon montage, comme elle seule en a le secret. Mais le plus émouvant dans ce qui s'est passé lundi a peut-être été l'annonce du clip par Jerry Lawler, qui le connaissait bien pour avoir travaillé avec lui avant même que l'un et l'autre ne fassent carrière à la WWE. Le discours du King semblait plus que sincère et se permettait même une conclusion : "He will always be a hall of famer, no matter what." qui ne manquera pas de faire jaser les vieux fans de catch comme moi.

 

Le segment introductif avec, par ordre d'apparition Jerry Lawler, Bret Hart, R-Truth et John Cena était plus que sympathique lui aussi et il a offert une très bonne plateforme au bad guy. On dit souvent que les catcheurs ne deviennent grands qu'au contact des meilleurs et c'est exactement ce qui s'est passé ce soir. Autant j'avais été sceptique sur les capacités de Truth au micro auparavant, n'arrivant jamais à adhérer à son personnage, autant il m'a conquis avec cette promo. Martyriser "gentiment" un vrai enfant plutôt que de s'en prendre à son fan imaginaire était une bonne idée et sa faculté à rester dans son personnage en toutes circonstances a été telle qu'elle a presque réussi à faire perdre à John Cena son légendaire professionnalisme puisqu'il faillit éclater de rire au milieu du ring. La bataille verbale nous ménera à un tag-team match en main-event: R-Truth & CM Punk vs Rey & Cena.

 

 

Tiens, pour info et pour vous confirmer qu'il n'y a vraiment personne qui écrit les shows à la WWE, le "New & Improved Dolph Ziggler", le Dolph brun, c'est déjà fini…

 

 

Toujours du côté tag-team, la WWE nous a offert un match de championnat entre les tenants du titre et l'autre New Nexus (MMGC et David Otunga). Le match était plus que médiocre in ring et certainement pas sauvé par la présence en ringside de Batista Mason Ryan. Ce type a le look d'une armoire normande mais il en a malheureusement aussi le charisme et la mobilité dans le ring. Fort heureusement, CM Punk était aux commentaires et a, à lui seul, sauvé le match par ses remarques à la fois hilarantes ("Croyez-vous vraiment Josh Matthews que je vais vous dévoiler mes plans pour ce match alors qu'on est au bord du ring et que ce clone de King Kong Bundy pourrait m'entendre ?") et passionnées (qui se terminent d'ailleurs par un très drôle "I have Faith"). Histoire de couronner le tout, l'intervention brève mais judicieuse de la Superstar Straight Edge a permis la victoire de son équipe et aussi de remettre sa stable sur les rails.

 

Rien à redire donc, sur ce segment et pas beaucoup plus de mal à dire sur l'angle backstage qui est lié: une altercation pré-match entre Del Rio et Show-Kane, car ces mastodontes avaient eu l'outrecuidance de s'appuyer sur sa Ferrari, suivie après la déchéance des deux monstres gentils par une attaque automobile qui blesse le World's Largest Athlete à la jambe. L'angle peut paraître classique mais il a été bien interprété par Show et a surtout permis d'arriver à un monologue assez étrange de Del Rio. Je vous le résume : Alberto, une fois l'accident arrivé, est questionné sur ce qui s'est passé et refuse d'être responsable, accusant Ricardo Rodriguez.

 

 

Quels cons, ces Ricains : on leur avait pourtant dit dans la review que ce Pay per View ne valait pas grand chose.

 

 

Je ne sais pas vous, et vous allez peut-être trouver que je coupe les cheveux en quatre mais j'adore la manière qu'a la creative-team de la WWE de traiter l'aspect heel étranger de celui qui a la plus grosse paire du business. Hier à Over The Limit, il avait donné un discours sur les immigrants canadiens qui faisait écho à toutes les peurs d'invasion des USA par des flux migratoires mexicains. Et là, ce soir, il se retrouve dans une sale histoire où il est pris quasiment la main dans le sac mais s'acharne à nier ce qui semble être l'évidence et rejette la faute sur le petit personnel parce que c'est bien connu, les domestiques et autres employés de maison, on ne peut pas leur faire confiance.

 

Si vous ne voyez pas déjà où je veux en venir, je vous la refais. Alors je résume : un type, étranger, bourré de thunes, qui commet un forfait sur le sol américain, se fait prendre quasiment en flagrant délit, déclare qu'il n'y est pour rien et tente de faire porter le chapeau à quelqu'un d'une classe sociale inférieure. Ca ne vous rappelle rien ? Moi si et ça me paraît une très subtile allusion qui continue à placer Alberto Del Rio au centre d'angles où la haine de l'étranger est toujours convoquée avec juste ce qu'il faut de finesse pour ne pas être de la xénophobie.

 

 

Heureusement qu'il porte un masque, Sin Cara, parce que, côté charisme, il a pas l'air d'être au top.

 

 

Dernier point fort du show : son main-event. Si vous ne le regardez que d'un oeil, vous le trouverez bof, bof, un peu tiré par les cheveux même, surtout avec ce finish où Punk succombe à un springboard legdrop de Rey Mysterio tandis qu'il est coincé dans un sharpshooter de Bret Hart. Sauf qu'en prêtant un peu plus attention aux détails, tout fait sens et, encore une fois, CM Punk crève l'écran.

 

Oui, parce qu'en plus d'avoir offert une excellente prestation aux commentaires et obtenu le titre pour ses seconds couteaux du New Nexus, Punk a continué. D'abord, il s'est pointé dans le ring dans la même tenue que Randy Savage le 27 mars 1988, le jour où le Macho Man a gagné le titre à Wrestlemania IV. Et ensuite, il a, seul, raconté dans le ring l'histoire qui explique ce finish un peu bizarre.

 

 

Macho Man

 

 

Macho Punk

 

Macho Man

 

 

Macho Punk

 

 

Parce qu'en regardant de près ce match, où Macho Punk fait une excellente prestation, on y découvre quelques mouvements qui ne sont généralement pas dans l'arsenal de la superstar Straight Edge : un russian legsweep qui s'enchaîne immédiatement sur une tentative de tombé, ou même un Sharpshooter. En un mot, Punk, ce soir, a volé quelques mouvements au Hitman pour mieux provoquer la réaction finale. Et donc créé les conditions du booking qui finalement a permis à tous de se sortir du match avec une réputation plus grande qu'au départ.

 

Lundi soir, CM Punk a crevé littéralement l'écran en fournissant à lui seul tout ce qu'on est légitimement en droit d'attendre le part d'un show de la WWE : des commentaires amusants mais qui ne dévalorisent pas ce qui se passe dans le ring (espérons que Michael Cole a pris des notes, il n'a plus l'habitude de faire ça), un changement de titre (uniquement dû à son intervention), un hommage à un catcheur disparu récemment et un autre hommage à une légende vivante du business au moment même où citer son nom était approprié. Ajoutez à l'ensemble un main-event perdu certes mais dans des conditions plus que discutables et vous aurez une performance exceptionnelle de la part d'un lutteur qui a hier crevé l'écran sans jamais voler de la lumière aux autres. Du grand art, simplement.


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