Buildup à la papa

Il va y avoir du sport!
Mais moi j'reste tranquille.

Silmaris, Va y avoir du sport

 

Tandis que Raw fonce vers Wrestlemania en brûlant tous les feux, au risque de s’exposer à de sévères critiques, Smackdown construit ses matchs du Grandest Stage sur un rythme étonnamment pépère. Du coup, il y a moins de raisons de gueuler à la vue des shows actuels du vendredi. Moins de raisons de s’enflammer aussi, hélas.

 

 

Allez-y, John.

– OK. Voilà: Miz, je vais te battre et devenir Champion WWE.

– Bravo, John. Vous avez réussi à prononcer une phrase entière sans faire de rimes. Nous sommes fiers de vous.

 

 

Nalyse de Smackdown du 11 mars

 

Il va y avoir du sport!
Mais moi j'reste tranquille.

Silmaris, Va y avoir du sport

 

Tandis que Raw fonce vers Wrestlemania en brûlant tous les feux, au risque de s’exposer à de sévères critiques, Smackdown construit ses matchs du Grandest Stage sur un rythme étonnamment pépère. Du coup, il y a moins de raisons de gueuler à la vue des shows actuels du vendredi. Moins de raisons de s’enflammer aussi, hélas.

 

 

Allez-y, John.

– OK. Voilà: Miz, je vais te battre et devenir Champion WWE.

– Bravo, John. Vous avez réussi à prononcer une phrase entière sans faire de rimes. Nous sommes fiers de vous.

 

 

Nalyse de Smackdown du 11 mars

 

 

Comme toujours en période pré-Mania, le star-power de la WWE penche lourdement du côté de Raw, le vaisseau amiral. C’est évidemment dans les storylines de Raw qu’ont été versées les plus grandes stars des temps passés — The Rock, Stone Cold, Trish Stratus; c’est à Raw que l’Undertaker, pourtant pensionnaire de Smackdown, a effectué le 22 2 11 son grand retour; et même les main-eventers de la brand bleue, à savoir Edge et Del Rio, squattent à Raw depuis des semaines pour promouvoir leur feud. Sans oublier les innombrables rediffusions de segments de Raw pendant Smackdown, parfois dans leur intégralité… Ce vendredi, pourtant, Raw a prêté un peu de sa grandeur à son concurrent, en y envoyant John Cena et Triple H, excusez du peu. Et les deux hommes n’ont pas perdu leur temps, ni le nôtre: en se retrouvant à Smackdown, c’est comme s’ils avaient été happés par l’ambiance moins frénétique qui y règne, et ont profité de l’occasion pour fournir deux promos aussi sérieuses que réussies.

 

 

Quatre heures du matin, manoir McMahon-Helmsley. A la lumière blafarde du réfrigérateur, Triple H prépare le biberon de sa petite dernière.

 

 

Car à la différence de Raw, pris dans le maelström de l’«extravaganza» propre à la Road to Mania (feud titanesque entre le Rock et Cena, bordel austinien entre Lawler et Cole, Loana ricaine en guest host ce soir, etc.), Smackdown bâtit ses feuds à l’ancienne, selon des méthodes éprouvées au cours de centaines de ppv. Au point parfois de carrément dupliquer ses segments. Quoi de plus classique, en effet, que le combo «A et B sont dans un ring, ils commencent à se taper dessus, irruption de C et D, organisation d’un match tag team AC contre BD»? Eh bien, on y a eu droit deux fois de suite en début de show. Edge lança la soirée d’une promo solitaire vite interrompue par Del Rio, accompagné d’un Clay tellement rugissant qu’il en devient involontairement comique. Attaque des heels, arrivée de Christian pour aider son vieux pote, apparition de Teddy Long pour nous envoyer tout ce beau monde en tag team pour le main event. On a vu ça mille fois, mais why not. C’est dans les vieux pots, etc.

 

 

Tiens, Brodus Clay a un annonceur personnel, maintenant.

 

 

Le temps de reprendre notre souffle et voilà Wade Barrett qui arrive pour un match contre Kane, traité au passage d’expérience chimique manquée. Difficile de donner tort à l’Anglais, que ce soit au vu du physique du Big Red Machin ou de son psychisme effectivement détraqué, si l’on en juge par l’évolution de son personnage depuis trois mois (oui, et depuis quinze ans aussi, en vérité). Bref, le Core déboule très vite, disqualification de Wade, le Big Show suit pour aider son copain de shopping, et blam, match à deux contre deux décidé illico, ce qu’on découvre au retour d’une coupure pub particulièrement mal placée. Le plus curieux dans cette histoire (qui répète donc à peu de choses près le segment précédent), c’est que Barrett fait équipe avec Slater. Pourquoi lui et pas un autre membre du Core, par exemple Ezekiel Jackson, qui semblerait bien mieux indiqué? On ne le saura jamais. Quant au match, il s’acheva rapidement avec un nouveau run-in du Core, contré par le Big Show venu agiter une chaise sous le nez des impétrants pour la dixième fois depuis le début de la feud. Pour la bonne bouche, le titan finira par planter un coup de chaise à Kane histoire de se venger du même sort subi la semaine précédente.

 

 

– Ezekiel, ohé, c’est dans le ring que ça se passe!

– Ouais, mais je vois mieux sur le Titantron.

 

 

Les deux golgoths sont désormais quitte, et donc copains, et tout ça paraît conduire tout droit à quelque match à handicap chelou à Mania (Show et Kane contre le Core), même si les rumeurs parlent avec insistance de l’adjonction de Kingston (pas vu de la soirée) et de Christian au duo de béhémots. Sachant qu’à eux quatre, les gars du Core ne parviennent pas à prendre le meilleur sur le Show tout seul, les envoyer à Mania contre un combo Show-Kane-Kingston-Christian tiendrait de la boucherie. Et du booking pourri, accessoirement, tant ce match, s’il a lieu, n’intéressera personne et dévaluera encore le titre de Champion Intercontintental… Accessoirement, il semble bien qu'on ne saura jamais pourquoi le Nexus était intervenu pour enterrer l'Undertaker lors de Bragging Rights.

 

 

Kane, finalement je vais te dire pourquoi on t’a aidé à battre l’Undertaker. C’est parce que tu nous es naturellement sympathique. Voilà, c’est tout, et que l’IWC arrête de nous saouler avec ça maintenant.

 

 

Autre feud à construction classique: celle opposant l’homme fier d’être masqué à l’homme honteux d’être masqué, et reprochant à l’homme fier d’être masqué d’être le responsable de la défiguration qui le force à porter un masque. Sounds familiar? Ben ouais, c’est exactement la situation d’il y a un peu moins d’un an, avec Rey Mysterio dans son propre rôle (« Je porte ce masque avec fierté, Mexico, booyaka, vive Jésus Christ ») et Cody Rhodes dans celui de CM Punk (« Salaud, c’est à cause de toi que je dois dissimuler mon visage parfait sous un masque, pour la peine je vais t’arracher le tien »).

 

Feud classique, donc, et build classique, chacun des deux hommes obtenant une victoire convaincante ce soir. Rey a battu après un match très agréable un Drew McIntyre qu’on espère voir en action à Mania, et Cody Rhodes, en costume de ville, a squashé JTG en quelques secondes, tout en cabotinant à mort dans son rôle de fantôme de l’Opéra. Classique, donc moyennement excitant (Rhodes n’est que le vingtième catcheur à promettre de démasquer Mysterio), mais bien foutu tout de même. D’autant que la conjonction 1) des rumeurs faisant état de la fatigue de Rey 2) de l’arrivée de Sin Cara et 3) de la confiance dont Cody jouirait en backstage rend (un tout petit peu) envisageable un « shock moment » à Mania, où Cody démasquerait effectivement Rey, même si je ne parierais pas mon Dashing faciès là-dessus.

 

 

Je ne comprends pas, le service merchandising refuse de mettre mes masques en vente.

 

 

Restons dans le classique avec le fameux coup du Face humilié dans sa ville d’origine, grand leitmotiv de la WWE pour des raisons qui restent à éclaircir. Cette fois, c’est Kaitlyn, Houstonienne, qui a eu droit. Kait who? Mais si, la nana body-buildée qui a gagné NXT3 et donc remporté un title shot, vous vous en souvenez? Non? Elle non plus, apparemment. Quoi qu’il en soit, l’ex-passade de Dolph Ziggler, étrennant une seyante tenue de cuir noir, a été battue en deux temps trois mouvements par Layla, et la principale nouvelle de la soirée, c’est que oui, les Laycool sont de nouveau les meilleures amies du monde, la suite à Raw et à Mania, apparemment.

 

 

Encore plus efficace que le plâtre de Bob Orton: la botte orthopédique de Michelle McCool.

 

 

Tout aussi classique fut le main event. On évita soigneusement l’affrontement entre Edge et Del Rio, ce qui offrit beaucoup de temps d’antenne au rookie Clay et au revenant Christian. Brodus tint parfaitement son rang de grosse brute, et paraît déjà bien au point niveau timing, ce qui le place d’entrée de jeu au top des gardes du corps maousses du moment, probablement devant Mason Ryan et Ezekiel Jackson. De son côté, Capitaine Charisme (un surnom sans douté volé à Didier Deschamps) n’a rien perdu de son énergie et de sa dextérité. Résultat: un match sympathique, au cours duquel Clay évita une première fois, grâce à Del Rio, le Tornado DDT qui lui avait été fatal au Raw précédent, contra un Spear en corde à linge maousse et ne s’inclina qu’une fois Del Rio éjecté. Tout cela fut très correct, mais la construction du match a quelque peu nui à l’excitation qu’on devrait éprouver à la vue de la grande réunion du duo Edge & Christian: pas de spots à deux, pas de pause plastique pour les photographes, simplement un éternel récit du Face en péril que son copain finit par sauver, comme on l’a vu dans des milliers de matchs. Les deux héros d’il y a dix ans sont encore en forme, bien plus par exemple que leurs anciens adversaires les Hardy Boys (haha), mais la reconstitution du couple légendaire n’a pas réellement accouché du sommet d’émotion attendu, la faute à un booking trop sage.

 

 

Edge, mon vieux, que d’émotion! Dix ans après, on retourne ensemble à Mania!

Ouais, enfin, j’y vais en tant que décuple champion du monde en titre, avec vingt minutes de match à la clé, et toi, ton rôle, ça sera de te battre en ringside dix secondes avec Ricardo Rodriguez avant de te faire étendre pour le compte par Brodus Clay.

– Je te déteste, sale enculé.

– Me parle pas, tocard.

 

 

Résumons ces feuds de Smackdown: du sérieux, du classique, du WWE pré-ppv, quoi. Le champion et le challenger se chauffent et passent leurs nerfs sur leurs alliés respectifs. Machin et bidule s’embrouillent, truc et muche les rejoignent, bing, bam, boum,  match. Tartempion veut enlever le masque de Rey Mysterio, match. Du réfléchi, du costaud, de la bonne ouvrage. Et les deux invités de marque en provenance de Raw se sont fondus dans le moule. Or si ce classicisme des feuds de Smackdown laisse un peu à désirer dans la mesure où, à la veille de Mania, on rêve un peu de grands frissons et d’originalité, une dose de ces méthodes éprouvées ne fait pas de mal aux feuds de Raw, plus échevelées.

 

Ainsi de John Cena, venu offrir à Michael Cole « l’interview de l’année », d’après les mots du reporter de guerre à la dégaine de comptable de banlieue. Ce fut du Cena comme je l’aime. Sérieux, déterminé, no bullshit, comme il le dit lui-même (enfin, il dit « BS » pour bullshit, mais j’ai décrypté!). Pas de rap douteux, pas de montages photo bidon, pas de blagues de CP. Non, Cena est « all business » et c’est heureux car ce comportement nouveau montre qu’il prend enfin le Miz au sérieux: en deux mots, l’attaque du Champion à la fin de Raw a rappelé le sens des priorités au Marine. Il s’était laissé déconcentrer par ses démêlés avec le Rock et en était presque venu à oublier qu’il avait un match pour le titre WWE à Wrestlemania. Mais le Miz a commis une grave erreur en lui administrant cette piqûre de réveil, car désormais, Cena a les yeux braqués sur la sale gueule du Champion, qu’il entend bien casser en petits morceaux, et pas plus tard que bientôt.

 

 

– John, une question, comme ça, à brûle-pourpoint: qui est le champion WWE en exercice?

The R… ah non, je sais, je sais, The Miz!

– Bravo, John!

 

 

Ce fut intense sans que l’orateur ne sombre dans le hurlement (son péché mignon), et ça met bien over le Miz, que John a même qualifié de « Face of the WWE ». Rien à redire à ce segment, d’autant qu’il s’entremêle harmonieusement avec la feud Cole-Lawler. Chacun connaît l’adoration que Michael Cole porte au Miz, et donc son inimitié pour Cena… lequel a d’ailleurs aidé Jerry Lawler une fois ou deux ces derniers temps. Rien de plus normal, donc, que cette super interview fut un piège visant à faire démolir Superman par le nouvel allié de Cole, Jack Swagger!

 

Certes, le piège aurait été plus fin si l’interview avait eu lieu backstage et si Swagger avait attaqué Cena en traître; là, il s’est contenté d’arriver en courant dans le ring, face à un Cena préparé au combat. Naturellement, la plus grande star des deux finit par avoir le dessus et par porter un AA à Swaggie, après avoir fait miroiter le même sort à Cole (mais celui-ci doit être préservé pour la pluie de Stunners qui l’attend à Mania). On ne serait pas étonné de voir, d’ici le ppv, un match en bonne et due forme entre Cena et Swagger, ce qui est toujours un plaisir, et globalement la séquence a été très réussie. Le meilleur Cena, c’est à mon sens le Cena sérieux, conscient de sa valeur, et qui laisse voir qu’il se battra jusqu’au bout. C’est là un Face bien meilleur que celui qui multiplie les vannes débiles à l’encontre de ses adversaires, à bon entendeur…

 

 

A bon entendeur Yo yo yo check this out!

 

 

Bon, c’est pas gagné.

 

Un jugement similaire peut être porté sur la promo de Triple H, venu se faire mousser sur les terres de l’Undertaker. Je n’ai pas changé d’avis à propos du buildup de cette feud. De mon point de vue, il y avait un moyen, et un seul, de la rendre réellement attrayante, et de vraiment nous convaincre qu’une victoire de Trips est possible: un retour de Triple H en mode ultra-heel, barbare, impitoyable et dévoré par la volonté d’en remontrer au monde entier. Avec un petit côté « beau-fils de Vince », en plus, au risque de s’approcher du work-shoot. J’en ai même fantasmé toute une storyline, que j’entends bien mettre en ligne ici un de ces quatre, hé ouais, moi aussi, comme Hunter, je profite de mon statut privilégié!

 

En attendant, la vraie storyline, c’est à peu près un copier-coller de la double feud Taker-Michaels des années précédentes, à ceci près que l’adversaire du Taker n’est cette fois pas Mr Wrestlemania mais le King of Kings, pas le « meilleur performer de l’Histoire » mais « le plus grand champion de l’Histoire » — bref, la nuance n’est pas si grande. Comme à Mania 25 et 26, le match du Taker sera un choc entre deux légendes du business, deux hommes qui ont tout gagné et qui n’ont plus rien à prouver à quiconque, et qui s’affrontent pour la gloire mais dans le respect mutuel. Trips a bien tenté ce vendredi d’aller un peu vers ma storyline rêvée (« Shawn dit que je suis une grosse brute sans cœur… Ben c’est vrai. L’Undertaker a voulu que ce match soit No Holds Barred… Ben merci, Taker, ça m’arrange bien. »), mais la streak est un monument si immense qu’il faudrait un buildup bien supérieur à « Triple H voudrait bien gagner » pour nous faire croire qu’elle pourrait être stoppée dans trois semaines.

 

 

Pour augmenter ses chances contre l’Undertaker, Triple H s’est fait greffer un troisième poing, sur la poitrine.

 

 

Malgré tout, HHH a fait le boulot dans la mesure de la limite que lui impose son statut de Face qui entend probablement le rester après Mania (car si un vrai heel turn est prévu pour lui dans le courant du match, il aurait été bien plus cohérent de réaliser ce turn dès son retour). Il s’est ainsi inscrit dans la continuité de ce show appliqué, agréable mais moins inoubliable qu’il aurait dû être sachant que Cena et Triple H y sont apparus et que Edge & Christian s’y sont retrouvés pour la première fois depuis un sacré bail.

 

 

– Copain, tu me laisses tenir ta ceintures cinq secondes?

Non.


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