Christophe Agius, l’interview – Première partie

Please welcome our friends and colleagues at the French announce table, Christophe Agius and Phillipe Chéreau!
— Jerry Lawler à Wrestlemania 30.

Grosse suprise dans le milieu catchesque français: Christophe Agius aurait filé sa dem’ à NT1, pour des raisons que l’on ignore encore. Comme on aime bien ce mec, nous en profitons pour remonter l’interview (en deux parties) qu’Axl et Toghril Madjar (mais il s’appelait encore Reune) ont eu le plaisir de mener en 2010.

– Et là, je dis à Kane: et alors, c’est vrai que t’as un micro-pénis? Et lui il me répond « tu veux voir? » et là blam il baisse son froc! Mwahahaha! – Mwahahaha! – Chris, t’avais une vie de rêve, mec, pourquoi t’as filé ta dem’?

On ne présente plus Christophe Agius, commentateur déjanté de la WWE, inventeur (avec son comparse Philippe Chéreau) de nombreux rugissements passés à la postérité (« Simplement deeeeeeeux! », « Par-dessus la troisième corde! » et autres « La suite au prochain numéro! »), mais aussi vice-président de l’ICWA et propagandiste de longue date du catch en France. C’est à ce triple Agius (le commentateur, l’ICWA-iste et le fan) que nos gonzo-intervieweurs Reune Jacquot et Axl sont allés poser quelques questions, autour d’une bière qui a rapidement vu débarquer ses petites sœurs. Sachez que la retranscription ne rend pas vraiment honneur à l’alcoolisation progressive de la conversation.

Chris Agius, c’est carrément l’interviewé idéal. Notre co-auteur (il a écrit la préface du chef d’oeuvre « Les 50 superstars du catch » que nous avons rédigé), que nous ne connaissions pas personnellement, nous donne rendez-vous à 19h00 pour une heure d’entretien… et il reste avec nous jusqu’à minuit, transformant au passage la sage « interview autour d’un café dans un endroit pas trop bruyant » en « biture enjouée avec grosse bouffe pour caler ». Il vient pour parler de son boulot, et il le fait très bien; mais discute également de tout et n’importe quoi avec la décontraction et la franchise d’un vieux pote. Et finalement, malgré nos protestations, il règle la (considérable) addition pour tout le monde, comme un prince. De tout ça, on a tiré plus de 40 000 signes (et encore, on est loin d’avoir tout transcrit), donc on vous livre l’interview en deux parties, sinon vous finirez la lecture dans le même état que nous avions fini la soirée.

Le Chris Agius est présenté ici dans son environnement naturel: un Chéreau et plein de bouteilles.

Christophe, commençons par l’opprobre immense que subissent les fans de catch dans ce pays…

Opprobre? Putain, si vous utilisez des mots comme ça, on est mal barrés!

OK, pardon. C’était pour faire style on est des intellos. Justement, le catch est considéré en France comme un truc de gros débiles, surtout à partir d’un certain âge. En gros t’es fan de catch, t’es la star dans ta cour de récré, mais passé la puberté… Y a eu par exemple un article au lance-flammes de Libé, intitulé « De kitsch et de catch » en 2008, au moment du show de Strasbourg de la WWE. On y voit bien que le catch est méprisé par l’intelligentsia.

Oui, c’est une évidence, le catch a une très mauvaise image. On regarde ça de haut dans énormément de milieux, a fortiori dans celui de la télévision.

Tu t’en rends compte, à ton niveau? Par exemple quand tu vois des collègues de la télé, t’as l’impression qu’ils te prennent de haut?

A vrai dire, je n’en vois pratiquement pas. Philippe et moi, on est en total vase clos. On enregistre à AB, on est perdus au fond d’un studio, on est à trois avec l’ingé-son (coucou Samuel), et on ne rencontre personne du milieu de la télé.

A AB, on te demande parfois de faire autre chose que du catch?

Non, on ne me demande pas de faire autre chose. Dans le milieu de la télé, le catch à une sale image. Pourtant sur NT1, on fait les meilleures audiences de la chaîne, mais ce n’est pas vraiment mis en avant. Même si ça marche, pour pas mal de gens dans ce milieu, le catch ça reste de la sous-sous culture.

Cette image négative, ça t’énerve? C’est quelque chose que tu voudrais contribuer à faire changer?

Pas forcément. A mon avis, ce n’est pas un problème. Si l’image doit évoluer, ça pourrait se faire progressivement, comme pour le foot. Avant 1998, le foot avait une image pourrie aussi. Bon, cela dit, y a encore pas mal de gens qui considèrent que les fans de foot sont des couillons. Pour tous les hobbies de ce genre, il y aura toujours des gens qui regarderont ça avec mépris. Le catch n’a pas besoin de changer d’image, elle est bien comme elle est. Du coup, les gens qui aiment ça, de tous milieux, ils assument. Ils aiment bien ce côté « On est des cons et on vous emmerde! » Si les gens qui nous méprisent parce qu’on aime le catch continuent de le faire, ben tant pis pour eux, nous on s’amuse bien dans ce truc-là. Pourtant, dans les shows de la WWE ou de la ICWA, je rencontre des gens de toutes classes sociales (des avocats, des ouvriers, des profs, des chefs d’entreprise), y compris des gens très cultivés mais qui aiment le catch pour ce que c’est.

Non seulement les fans français de catch sont cultivés, mais en plus ils sont polyglottes!

Tu ne crois pas que cette attitude des fans de catch — un peu « nobody likes us, we don’t care » —, ça peut nuire au développement du catch en France?

De toute façon, le catch a mauvaise réputation dans tous les pays. On croit parfois, parce que Lawler et Ross en parlent très sérieusement, que l’image est meilleure aux États-Unis, mais ce n’est pas le cas. Là-bas aussi, on considère le catch comme la dernière des guignoleries.

Pourtant, on voit les guest hosts qui se succèdent chaque semaine, ils doivent probablement se bousculer pour y faire un passage. C’est donc que pour les Américains, il n’est pas si honteux que ça d’être associé à la WWE…

Oui, mais ce sont des célébrités de second ordre. Si on va par là, alors la Ferme Célébrités c’est prestigieux aussi, parce que toutes les célébrités de second ordre se battent pour la faire.

N’empêche, si tu prends l’équivalent français des célébrités de second ordre américaines qui ont joué les guest hosts, tu ne trouveras pas grand-monde pour avouer aimer le catch et encore plus accepter de s’associer à un spectacle de catch…

Si, y en a quand même. Par exemple dans les chanteurs, y a Didier Wampas, et puis des punks alternatifs à la Manu Chao, fans de lucha libre parce qu’ils adorent la culture mexicaine. Sinon, y a aussi des acteurs et des sportifs. Y a un rugbyman du Stade Toulousain, je crois, qui fait le « You can’t see me » après avoir marqué un essai. Maurice Barthélémy était venu à un show aussi, de même que Grégory Coupet, mais bon, eux je pense que c’était plus pour faire plaisir à leurs enfants. Je crois qu’Anelka est fan de catch aussi. Toute façon, ils ont pas trop l’occasion de révéler qu’ils s’y intéressent, ici ils n’ont pas d’endroit pour être guest hosts.

Donc toi, tu ne vas pas forcément contacter des stars françaises pour venir faire coucou à l’ICWA, dont t’es le vice-président…

Attendez, moi à l’ICWA, franchement je fais pas grand-chose. J’aide comme je peux, je commente les shows, je contribue aux scénarios, mais ça s’arrête à peu près là.

A ce propos, tu vois une différence fondamentale entre le catch européen et le catch américain au niveau de l’écriture?

L’écriture est forcément différente si on compare le catch européen à la WWE, tout simplement parce que aujourd’hui aucune fed européenne n’a de retransmission télé, alors que la WWE écrit pour la télé. C’est différent de ce qu’on fait quand on écrit un show itinérant, quand on sait que les gens n’ont pas vu le show précédent et qu’ils vont découvrir les catcheurs pour la première fois et ne les reverront peut-être jamais, ou alors l’année prochaine s’ils reviennent. De ce côté-là, l’écriture est donc complètement différente. Après, pour le kayfabe, ça dépend des visions. En France, les vieux de la vieille vont respecter le kayfabe à mort, nous moins.

En France, t’as l’impression que l’engouement actuel pour le catch va continuer et prendre encore plus d’ampleur, ou au contraire que nous sommes déjà dans une phase descendante de cette mode?

Moi, j’ai toujours dit qu’il ne fallait pas s’enflammer, que ça allait redescendre à un moment ou à un autre. Après, que l’on soit dans une phase descendante, ascendante ou que sais-je… Je n’ai pas d’enfant à l’école, je ne sais pas à quel point les gosses apprécient encore le catch en ce moment, tout ce que je sais c’est que nos audiences sont encore meilleures cette année que l’année dernière (où elles étaient déjà très hautes).

En tout cas, on voit plein de produits dérivés en vente partout, et même pas mal de jeunes qui se baladent en tshirts de catch…

Oui, c’est vrai que ça reflète quelque chose. On n’aurait jamais osé mettre ça y’a 20-25 ans, on se serait fait tuer!

Génération décomplexée.

Justement, les années 1980-1990 c’était un peu les années « les fans de catch se cachent pour souffrir », et ce malgré l’engouement des années 1987-1993…

Tout trentenaire aimant le catch a la nostalgie de ces années, ce temps béni où on avait neuf-dix ans, aucune responsabilité et pour seul but de la semaine de voir Superstars le weekend! Moi je ne me suis jamais trop caché, je suis originaire d’un petit patelin en Alsace de quelques milliers d’habitants (Souffelweyersheim) et mes camarades ont toujours été habitués à ma passion pour le catch! Chaque année, j’arrivais à en convertir un ou deux et j’ai surtout eu deux bons camarades qui ont suivi le catch avec moi depuis tout petits et qui sont encore fans maintenant (NDR: Naniwa et Ichtou). On était des geeks, en somme! Et aujourd’hui encore, ça reste en partie un truc de mecs, garçons ou ados, qui matent ça entre eux…

T’as une idée de la proportion de filles parmi les téléspectateurs et plus largement parmi les fans de catch en France?

Ben dans la mesure où je suis toujours célibataire, beaucoup trop peu! La plupart des femmes qui viennent aux shows de l’ICWA, par exemple, c’est surtout des mères de famille qui accompagnent leurs enfants. Mais bon, elles ne sont pas fans elles-mêmes, c’est les gosses qui insistent. C’est comme moi, quand j’étais môme, je disais à ma mère « Oh, c’est les Survivor Series, alors faut qu’on regarde! » Et pendant que moi je pleurais en voyant Macho Man se faire mordre par le cobra, ma mère rigolait!

L’ICWA a réussi, ces dernières années, à faire venir pas mal de stars étrangères en France. Vous avez même eu Bryan Danielson…

Oui, on est les premiers à l’avoir fait venir en France. Ca date, c’était à Revolution II, donc ça fait déjà sept ans. C’était à Rethel. Danielson était déjà une référence à l’époque, donc on était très contents de l’avoir!

Il est comment en vrai? Il est gentil?

Il est super gentil. Comme tu le vois à la télé, en fait. C’est un gentil garçon, il ne fait pas de bruit dans les vestiaires. Ce n’est pas le catcheur qui va venir vomir devant la porte de ta chambre à l’hôtel, quoi.

C’est qui le catcheur qui va venir vomir devant la porte de ta chambre à l’hôtel?

Qui c’est les connards du milieu, en fait? Bon, ce n’est pas un connard mais il a un comportement de starlette: Raven. Le mec il arrive à la gare de Strasbourg, il ne faut pas qu’on vienne le chercher dans un truc plus petit qu’un 4×4. On l’amène à l’hôtel, avec tous les catcheurs, il nous dit « cette chambre me va pas, j’en veux une autre » et ainsi de suite. En même temps, c’est un mec qui peut être super sympa, il a beaucoup d’humour. Et franchement, c’est le seul qui nous ait fait chier sur ce genre de trucs. Même Vampiro, que l’on nous présentait comme « space », a été très cool.

Tant qu’on lui fournit sa dose de sang de jeune fille, il est pas difficile.

Vampiro, qui avait reçu des menaces de mort quand il feudait avec Sting…

Oui, et de sérieux problèmes dans la vie avec Konnan, ça a failli très mal se terminer plusieurs fois dans des rixes au Mexique… terre hostile puisqu’il y a eu quelques morts récemment dans la lucha libre (comme Abismo Negro, qu’on a retrouvé dans le fleuve de Tijuana).

A propos du Mexique, tu penses quoi de la diffusion de lucha libre sur Jimmy?

C’était une bonne chose, ça faisait des audiences correctes… Mais ils ont arrêté de diffuser, malheureusement pour les fans.

Et la NOAH, tu penses qu’il y aurait un créneau en France? Eurosport en a diffusé dans les années 1990…

Je ne suis pas trop au fait de ce que fait la NOAH aujourd’hui. Je suivais attentivement il y a quelques années, mais quand je me suis mis à bosser beaucoup, j’ai eu du mal à regarder du catch en dehors du boulot… Mais je pense que bien monté, un show de puro pourrait bien marcher en France, si on explique bien aux gens ce que c’est. Moi j’ai des dizaines et des dizaines de cassettes de Kawada, Misawa, et compagnie, je trouve que le puro, c’est génial. La mort de Misawa, ça m’a beaucoup touché. Après, je ne sais pas si une chaîne française va prendre le risque d’en diffuser.

C’a l’air envisageable, vu que succès de la WWE a incité les chaînes à diffuser pas mal de programmes catchesques…

C’est vrai. La WWE n’ayant pas assez de programmes pour tous, les chaînes se sont dirigées vers d’autres fédérations et ont acheté un peu n »importe quoi comme la NWE…

C’est pas un contexte propice à ce que l’ICWA fasse un vrai bond en avant et tente de s’allier à une chaîne pour monter un programme télévisé?

On a des projets en ce sens, mais pour l’instant c’est secret défense…

Un projet avec Canal, dans la foulée de votre contribution à « Catch-moi »?

Non. Canal n’a aucun intérêt à diffuser un show de catch français. On est encore très loin des Américains à énormément de niveaux, à commencer par la production.

Qu’est-ce qui manque à l’ICWA pour faire une vraie percée? Un grand nom? Un Français qui irait catcher à la WWE puis reviendrait ici?

Pas forcément un Français. Nous, on a Joe E. Legend. Il a catché à la WWF à la fin des années 1990. Bon, fallait vraiment être là pour s’en souvenir… N’empêche, et même s’il n’est pas super connu, il a une expérience énorme. Il y a presque deux ans maintenant, on a fait le Grand Palais de Lille, y avait 3 000 personnes; ben Joe, tu le lances dans la salle, c’est comme si Hulk Hogan était là, j’exagère à peine. Il a un gros savoir-faire, il a bossé partout. Il a d’ailleurs beaucoup bossé en Afrique du Sud, à la fédé d’où vient Justin Gabriel – fédé qui justement fait plus d’audience que la WWE en Afrique du Sud.

Joe E. Legend est tellement un vétéran qu’il a connu Serena quand elle avait encore ses cheveux!

Ca devrait donner espoir à l’ICWA, ça. A quand le jour où ses shows exploseront les audiences de la WWE en France?

C’est différent. Le paysage audiovisuel en Afrique du Sud est tout à fait différent, les gens parlent couramment l’anglais, les catcheurs locaux ont vraiment l’espoir de devenir une star du catch. C’est aussi le cas pour les jeunes catcheurs en Angleterre, voire en Allemagne ou même en Autriche. En France, c’est plus compliqué.

Comment t’expliques ça, que ça soit si compliqué pour un Français d’espérer percer dans le catch?

J’ai un pote qui est vraiment très bon, Tom LaRuffa. Il a fait un essai à la WWE mais malheureusement, a priori, il n’a pas le bon gabarit. Et puis bon, en France, il y a très peu de mecs qui ont le courage de se dire « Allez, je vais en faire ma vie, j’y vais. » Tom LaRuffa l’a fait. Il avait fait des études, il a une licence au moins, ou un mastère, je suis plus sûr. Et puis il a dit: « J’arrête tout, je vais chez Lance Storm, j’apprends. » Mais la plupart des mecs vont aller s’entraîner une ou deux fois par semaine, point à la ligne.

Quand Tom LaRuffa se taille la barbe, il le fait avec un énorme couteau. C’est ça un warrior.

Les aspirants catcheurs français n’ont généralement pas cet état d’esprit à l’américaine, genre « je plaque tout et je me concentre à 100% sur un truc hyper compliqué sans garantie de succès »…

Oui, mais ça s’explique aussi par le fait que personne ne leur a montré que c’était possible. Bon, y avait André le Géant, mais ça commence à dater et c’est un cas particulier! En plus, il y a la situation économique, et plein d’autres facteurs. Tous les mecs ne sont pas des no-life, ils ont des familles, des potes, des copines, d’autres hobbies… Alors que la plupart des gars qui réussissent aux Etats-Unis, ou qui viennent d’Europe et réussissent aux Etats-Unis, ils n’ont aucune vie par ailleurs, j’exagère à peine. Leur vie, c’est de se lever le matin, de prendre leurs protéines, d’aller à la salle d’entraînement, de rentrer le soir, de reprendre leurs protéines, et ainsi de suite. Des gars comme Sheamus ou Drew McIntyre, et tous les autres qui tentent encore leur chance maintenant, c’est comme ça qu’ils fonctionnent. Le catch, c’est ça. Tu peux pas réussir si ce n’est pas ta vie, quoi. Ca demande énormément de sacrifices mais de ce point de vue, c’est comme beaucoup d’autres métiers. Je pense que c’est comparable à être comédien: tu dois faire plein d’efforts jusqu’à ce que tu réussisses. Après, une fois que t’es arrivé, tu peux éventuellement calmer un peu le rythme, mais c’est le genre de métier qui exige un don de soi énorme, du matin jusqu’au coucher.

Pour réussir à l’ICWA, est-ce qu’il faut être aussi acharné?

Réussir à l’ICWA, ça ne veut rien dire du tout. On est une petite fédé, on fait de petits shows…

Mais il doit bien y avoir des aspirants catcheurs dont l’horizon est un ring de l’ICWA, avant de rêver à l’Amérique…

Oui, il y a des élèves dont c’est le but à court terme. Dans un sens tant mieux, bien sûr. On en a déjà qui catchent chez nous, certains ont vraiment beaucoup de talent. Je pense par exemple à Peter Fischer ou à Lucas DiLéo. Bon, il va sans doute changer bientôt de nom. C’est un mec de chez nous, il a un physique de ouf, super talentueux… S’il pouvait se donner à fond, il pourrait aller très haut, mais après, il y a aussi les réalités de la vie, faut gagner sa vie, faut manger. Déjà, il est venu de Lorraine pour travailler chez nous, il est obligé de travailler… N’empêche, même s’il ne peut pas se consacrer qu’au catch, il se donne à fond et en quelques mois on a vu des progrès énormes. Si nous, on pouvait aller plus haut, avec la télé et tout le bordel, alors lui il pourrait devenir un vrai catcheur professionnel et pourquoi pas réussir au plus haut niveau. Toute façon, il n’y a pas de secret. Ce qu’il faudrait pour que nos catcheurs réussissent, c’est qu’ils bossent tous les soirs. Qu’on ait un show par soir, comme la WWF l’a fait dans les années 1980 et avant.

Quelle est la réputation de l’ICWA dans le milieu du catch, à ton avis?

Bonne. Les gens savent qu’on est sérieux. On collabore avec des fédés étrangères (par exemple les Japonais de la Dragon Gate, très contents de leur venue il y a deux ans), des catcheurs étrangers nous envoient leur CV… Les catcheurs savent qu’ils seront correctement traités s’ils travaillent avec nous, qu’ils ne vont pas se retrouver dans une salle vide, par exemple, comme ça arrive parfois à l’étranger mais aussi en France.

Il y a beaucoup de fédérations en France en ce moment, ça pousse comme des champignons. La concurrence, ça booste tout le monde ou bien c’est un problème?

Sans doute un peu des deux mais, globalement, la France est grande, chacun peut faire son truc, l’essentiel est que les gars aient des endroits où bosser. Si chaque soir, en France, il y a quelque part un show de catch, tant mieux!

Y a pas moyen que l’ICWA fasse la première partie des shows de la TNA ou de la WWE quand celles-ci viennent en France?

Ben déjà, Philippe et moi, quand la WWE vient, on n’a pas le droit d’entrer dans les vestiaires. Pour arriver une fois à dire bonjour au public de Bercy l’année dernière, ça nous a pris cinq ans. On a dû voir plein de personnes avant de passer, qui nous ont dit « ne montez pas sur le ring », « ne vous faites pas de prises de catch », etc.

Quand la TNA est venue, il y avait Varini sur le ring…

De ce point de vue, Célian a beaucoup plus de chance que moi! Il a dû attendre plus longtemps que moi pour réaliser son rêve de commenter du catch mais lui, il est tombé sur la TNA qui, à ce niveau-là, est comme la WCW à l’époque. A la WWE, en revanche, c’est bouche cousue. Qui que tu sois, tu ne fous pas les pieds dans les vestiaires.

Donc pas moyen de rencontrer les catcheurs?

Pas à ce moment-là, non. Mais quand ils viennent en promo, oui, comme ce qu’on a fait avec CM Punk (quand je lui embrasse les pieds), avec MVP plus récemment, ou avec Edge, qui était venu jouer aux jeux vidéo au Micromania Game Show. Ils ont généralement avec eux l’attaché de presse français, que Philippe et moi connaissons bien. Il y a aussi l’attaché de presse américain normalement. De toute façon, ils savent qu’on ne va pas poser aux catcheurs des questions trop pointues, du genre « tu prends des stéroïdes? » Mais ils surveillent à mort, malgré tout, alors que c’est justement dans un cadre un peu plus informel qu’on peut avoir le meilleur contact. Ce que les Américains ne comprennent pas, c’est que souvent, c’est parce que t’as discuté avec un mec entre deux plans que tu peux, après, faire un bon commentaire… Il y a deux ans, ils nous avaient invités à Wrestlemania 24. J’ai pu rencontrer Edge, Rocky Johnson, d’autres gars… Du coup, après, on avait plein de trucs à raconter à l’antenne, des trucs que tu ne lis pas dans les magazines ou dans leur autobiographie. Ca donne du relief.

Il y a, comme ça, parfois, dans le monde du catch, des moments de pure grâce.

La deuxième partie de l’interview est ici.


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